- Les Arméniens dans l'Empire ottoman au début du XXe siècle.
Le samedi 24 avril 1915, à Constantinople, capitale de l'Empire ottoman, 600 notables arméniens sont assassinés sur ordre du gouvernement. C'est le début d'un génocide, le premier du XXe siècle.
Le génocide arménien se déroule d'avril 1915 à juillet 1916. Les deux tiers des Arméniens qui vivent alors sur le territoire actuel de la Turquie périssent au cours de déportations, des famines et des massacres de grande ampleur. Il est planifié et exécuté par le parti au pouvoir à l’époque, le comité Union et Progrès, plus connu sous le nom de « Jeunes-Turcs », dirigeant l'Empire ottoman et engagé dans la Grande Guerre aux côtés des Empires centraux.
Aux premiers siècles de son existence, l'Empire ottoman comptait une majorité de chrétiens dont des Slaves, des Grecs, des Arméniens, des Caucasiens et des Assyriens. Ces chrétiens jouaient un grand rôle dans le commerce et l'administration, et leur influence s'étendait jusqu'au Sérail, le palais du sultan. Ces «protégés» n'en étaient pas moins soumis à de lourds impôts et avaient l'interdiction de porter les armes. Les premiers sultans témoignaient d'une relative bienveillance à l'égard des Grecs orthodoxes et des Arméniens monophysites. Ces derniers étaient surtout établis dans l'ancien royaume d'Arménie, au pied du Caucase, premier royaume de l'Histoire à s'être rallié au christianisme ! Ils étaient majoritaires aussi en Cilicie, une province du sud de l'Asie Mineure que l'on appelait parfois «Petite Arménie». L'Empire ottoman comptait environ 2 millions d'Arméniens à la fin du XIXe siècle sur une population totale de 36 millions d'habitants. D'après les plus récentes estimations, il coûte la vie à +/- 1.200.000 Arméniens d'Anatolie et d'Arménie occidentale.
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- Ébauche d'un génocide annoncé.
Après une tentative de modernisation par le haut, dans la période du Tanzimat, de 1839 à 1876, l'Empire ottoman entre dans une décadence accélérée. Après la déposition du sultan Mourad V le 31 août 1876, son frère Abdul-Hamid II monte à son tour sur le trône. Il attise sans vergogne les haines religieuses pour consolider son pouvoir.
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Entre 1894 et 1896, comme les Arméniens réclament des réformes et une modernisation des institutions, le sultan en fait massacrer 200.000 à 250.000 avec le concours diligent des montagnards kurdes. À Constantinople même, la violence se déchaîne contre les Arméniens du grand bazar, tués à coups de gourdin. Un million d'Arméniens sont dépouillés de leurs biens et quelques milliers convertis de force. Des centaines d'églises sont brûlées ou transformées en mosquées. Rien qu'en juin 1896, dans la région de Van, au coeur de l'Arménie historique, pas moins de 350 villages sont rayés de la carte. |
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De leur côté, les Occidentaux se contentent de plates protestations. Il est vrai que le «Sultan rouge» fait le maximum pour dissimuler son forfait et paie même la presse européenne pour qu'elle fasse silence sur les massacres. Abdul-Hamid II joue par ailleurs la carte de chef spirituel de tous les musulmans en sa qualité de calife. Il fait construire le chemin de fer du Hedjaz pour faciliter les pèlerinages à La Mecque. Il se rapproche aussi de l'Allemagne de Guillaume II. Mais ces initiatives débouchent sur l'insurrection des «Jeunes-Turcs». Ces jeunes officiers, à l'origine du sentiment national turc, reprochent au sultan de livrer l'empire aux appétits étrangers et de montrer trop de complaisance pour les Arabes. Par l'intitulé de leur mouvement, ils veulent se démarquer des «Vieux-Turcs» qui, au début du XIXe siècle, s'opposèrent à la modernisation de l'empire.
Le sultan cède à leurs exigences et rétablit une Constitution le 24 juillet 1908. Mais cela ne suffit pas à ses opposants. Le 27 avril 1909, les Jeunes-Turcs le déposent et installent sur le trône un nouveau sultan, Mohamed V. Soucieux de créer une nation turque racialement homogène, les Jeunes-Turcs multiplient les exactions contre les Arméniens d'Asie Mineure dès leur prise de pouvoir. On compte ainsi 20.000 à 30.000 morts à Adana le 01er avril 1909.
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Ils lancent des campagnes de boycott des commerces tenus par des Grecs, des Juifs ou des Arméniens, en s'appuyant sur le ressentiment et la haine des musulmans turcs refoulés des Balkans. Ils réécrivent l'Histoire en occultant la période ottomane, trop peu turque à leur goût, et en rattachant la race turque aux Mongols de Gengis Khan, aux Huns d'Attila, voire aux Hittites de la haute Antiquité. Ce nationalisme outrancier ne les empêche pas de perdre les deux guerres balkaniques de 1912 et 1913.
- L'Empire dans la Grande Guerre.
Le 08 février 1914, la Russie impose au gouvernement turc une commission internationale destinée à veiller aux bonnes relations entre les populations ottomanes. Les Jeunes-Turcs ravalent leur humiliation, mais lorsque la Grande Guerre éclate, en août de la même année, ils poussent le sultan Mahomet V à entrer dans le conflit, aux côtés des Puissances centrales, contre la Russie et les Occidentaux. Le sultan déclare la guerre le 1er novembre 1914. Les Turcs tentent de soulever en leur faveur les Arméniens de Russie. Mal leur en prend. Bien qu'en nombre supérieur, ils sont défaits par les Russes à Sarikamish le 29 décembre 1914. L'Empire ottoman est envahi. L'armée turque perd 100.000 hommes. Elle bat en retraite et, exaspérée, multiplie les violences à l'égard des Arméniens dans les territoires qu'elle traverse. Les Russes, à leur tour, retournent en leur faveur les Arméniens de Turquie. Le 07 avril 1915, la ville de Van, à l'est de la Turquie, se soulève et proclame un gouvernement arménien autonome. Dans le même temps, à l'initiative du Lord britannique de l'Amirauté, un certain Winston Churchill, les Français et les Britanniques préparent un débarquement dans le détroit des Dardanelles pour se saisir de Constantinople.
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